L'épée des Joyaux

En entendant les premières paroles de Kay, Davy ressentit un élan de panique. Il voulait détruire le monde, rien que ça? Mais il ne pouvait pas, il n'avait pas le droit, pas à cause d'une...D'une vengeance personnelle! Franchement, il ne pouvait le laisser faire ça...Mais que faire pour l'en empêcher, que faire?!

Il allait lui faire part de ses pensées d'un ton paniqué, quand Kay le coupa.

– Je t'assure que je ne veux pas que tu souffres et encore moins que nous soyons séparé, Davy.

Et, surtout, il rajouta:

– mon amour...

Le ton était si doux, si tendre, que ce fut comme une flèche en plein coeur qui déstabilisa momentanément Davy. Il se sentit fondre et devenir aussi mou que de la guimauve, et maudit sa faiblesse. Mais il n'y pouvait rien...Il s'approcha de son amant et se réfugia contre sa poitrine.

-Oh, Kay...

Il était toujours perdu. Perdu, et apeuré. Mon Dieu...Le pire, c'est qu'au fond de lui il croyait vraiment Kay capable de réaliser ce qu'il disait. C'était ça qui était terrible. Il respira son odeur rassurante, sentit sa chaleur sous ses doigts. Cela lui fit du bien. Ce n'est qu'au bout d'un petit moment qu'il trouva la force de se décoller de lui et de lui dire doucement, tout doucement:

-Kay...Kay, mon chéri...Je t'aime, mais...Tu ne peux pas faire ça, Kay, tu ne peux pas. Tu ne peux pas détruire un monde juste parce que tu es fâché contre une seule personne, Kay, tu n'as pas le droit de tuer des millions de gens juste parce que tu es en colère...Kay...

Il lui parlait comme on parle à un jeune enfant colérique, pour lui expliquer qu'il ne doit pas frapper sa soeur parce que son professeur l'a grondé ou que son jouet s'est cassé. Ou comme un animal sauvage, que l'on doit apprivoiser doucement, ne pas brusquer...

Davy se blottit dans les bras de Kay. Comme toujours dans cette situation Kay caressa les cheveux de Davy. Cette douceur, cette odeur... c'était un monde réconfortant plein de joie et de bonheur. Ramenant sa main vers ses narines, il espérait mieux capturer les senteurs délicates de son jeune amant. Le petit laps de temps où dura ce câlin, Kay fut bien, hors de toute peine.

Puis Davy se recula et commença à parler à Kay d'un ton doux. Kay écoutait Davy. Il se sentit étourdi. Que venait-il de se passer ? Davy venait de prendre une décision et la direction du couple en l'espace d'un instant. Ce fut Kay qui se sentait un petit garçon. Il voulu répondre, mais ne trouva pas les mots. L'évènement qui venait de se produire le perturba. La main sur l'épaule de Davy, il le repoussa. Puis il scruta ses yeux. Les cœurs étaient à l'état latent. Davy n'utilisait pas son pouvoir. Se pouvait-il que Kay soit sincère dans ses paroles ? Se pouvait-il qu'il aime Davy ?

– Stop Davy... il secoua la tête Que se passe-t-il là ? Depuis quand me prends-tu pour un... un... un innocent ?

Kay sembla se renfrogner. Il oscillait entre une envie de se reprendre et surtout de reprendre la situation en main, et une envie de fondre en larme contre Davy. La première l'emporta

– Tu ne peux pas comprendre ! Elle m'a trompé, trahit, bafoué ! Elle n'est qu'une simple humaine dans mon plan ! Il n'y a pas d'autre solution... car vous n'êtes que des objets pour elle. Vous n'existez même pas !

Kay se tut instantanément. Ses paroles venaient de dépasser ses pensées. Ou plutôt venaient de les rattraper.

Les pensées de Davy étaient confuses. Personne ne lui avait jamais parlé comme ça, comme un ami, comme un confident, comme un frère, comme un amant. Malgré qu'il restait un peu un enfant aux yeux de Kay, Davy avait grandi. Son discours était censé. Il s'assied sur une chaise lourdement, comme si la gravité de la situation contribuait à augmenter son poids. Que devait-il penser ?

– Je... je ne sais pas. Il regarda Davy les yeux embués de larmes. Tu crois que je ne devrais pas ?

Kay avait l'air un peu pitoyable. Son teint était livide. Il regardait dans le vide. Depuis son arrivé ici, son cœur avait toujours été rempli par une pléthore d'émotions parfois contradictoire. Mais très vite, il savait ce qu'il voulait et il avait rapidement compris comment l'atteindre. Mais plus maintenant...

– Je ne sais plus...

La tête posée contre la poitrine de Davy, Kay écouta ses paroles. Un long silence s'en suivi

– Peut-être que tu pourrais essayer de l'invoquer? Il doit y avoir des rituels pour ça...

Ces quelques mots sonnaient justes. Oui il devrait pouvoir le faire. Mais il devait y réfléchir. Il décolla sa tête de la poitrine de Davy et le regarda avec un mélange de joie et de fierté. C'était un peu comme s'il se sentait responsable de la maturité nouvellement avoué dont faisait preuve son jeune amant. Kay savait qu'il n'était pas jeune, mais son caractère et sa volonté le dirigeait facilement vers une assurance affirmative avec laquelle il pliait en général la volonté des autres habitants de Célestial. Et si leur volonté ne cédait pas, il connaissait d'autres moyens de les faire flancher. Davy avait lui une technique différente; une technique héritée de son ascendance cupidone. Prenant une grande respiration, il dit

– D'accord Davy, je vais voir si cela est une alternative.

Il prit la tête de Davy entre ses mains et posa ses lèvres sur celle de son amant. Puis sa langue les caressa délicatement. En embrassant Davy, il caressa ses doux cheveux, puis les saisit penchant légèrement Davy en arrière. Il mordilla la lèvre inférieur de celui-ci. Passant de sa joue à son cou, puis à son oreille, il lui susurra :

– Tu as mérité une récompense. Viens avec moi dans la chambre. Nous n'en sortirons que ce soir.

Le ton de Kay était sans équivoque un ordre malgré la douceur des paroles. Agissant ainsi, il reprenait son rôle et se plaçait en nouveau en leader du couple. Il était certain que Davy reprendrait le rôle qu'il connaissait le mieux et qu'il appréciait au fond de lui. Pour cela, Kay devait être fort et sûr de lui. Il espérait ainsi dissimuler à Davy son état fébrile... mais il ne savait qu'il essayait aussi de se le dissimuler inconsciemment.

Attirant Davy dans la chambre, les deux amants s'enlacèrent érotiquement. Sans qu'aucun des deux ne s'en rende compte, les yeux de Kay se marbrèrent de rouge tandis que les tatouages de son dos prenaient de l'ampleur, comme une gagrène qui s'étend.

Lorsque Kay releva finalement la tête, Davy constata avec soulagement que la colère avait quitté ses yeux. Il semblait plus stable aussi. Il y avait même une sorte de joie, une émotion qu'il n'était pas sûre de saisir, mais qui en tout cas semblait positive. Il prit une grande inspiration, puis parla, et les paroles qui sortirent de sa bouche étaient sensées. Il soupira de soulagement. Il avait reprit le contrôle, ne s'était pas fâché et avait écouté ce qu'il lui avait dit. Cela le comblait de joie. Tout allait peut-être s'arranger finalement...

Soudain, son amant prit son visage entre ses mains et l'embrassa. Aussitôt, une chaleur envahit son être, ainsi qu'un grand réconfort. Cela faisait du bien, après tout ce stress...Il sentit sa langue sur ses lèvres, ses mains dans ses cheveux, son souffle dans son cou...C'était si bon...Son coeur se gonfla d'amour, ce qu'il pouvait l'aimer, cet homme...

– Tu as mérité une récompense. Viens avec moi dans la chambre. Nous n'en sortirons que ce soir.

À ces mots, Davy sentit son coeur s'accélérer. Son côté pervers refit surface, il aimait au fond se faire dominer, se faire prendre en charge. Et la perspective de ce qui allait bientôt se passer suffisait déjà à rendre son souffle plus tremblant.

Le laissant l'attirer dans leur chambre, il l'enlaça, les yeux pleins de luxure. Pas un instant il ne remarqua les tatouages se propageant sur la peau de son amant. Ses mains se promenaient déjà sur sa peau, sous son vêtement...Ce soir, ils allaient s'aimer.

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